Anora de Sean Baker (2023)
Sean Baker est un réalisateur et scénariste américain né à New-York en 1971. Il avait déjà présenté un film à Cannes en 2017, «The Florida Project», à la Quinzaine des réalisateurs. En 2024, il présente «Enora» dans la Compétition Officielle et il remporte la Palme d’or.
«Anora» est un film actuel, bien ancré dans la réalité. Exit Cendrillon et ses copines!
Dès leur naissance, les petites filles sont bercées par des contes de fées débordants de guimauve depuis que Walt Disney s’en est emparé. Des versions originales écrites par les frères Grimm, il a gommé toutes les aspérités pour ne garder qu’une fin judéo-chrétienne (ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants) et l’attente d’un prince charmant.
Elles seront nombreuses à l’attendre, à l’espérer, à croire le rencontrer mais surtout à être déçues. Quitte à m’attirer les foudres, je l’affirme, le prince charmant n’existe pas!
Pourtant, il reste bien présent dans l’inconscient collectif de la gent féminine.
Les filles de ma génération ont toutes rêvé devant le destin de «Pretty Woman» et pourtant… Une jeune prostituée sauvée de sa condition par un beau milliardaire qui en tombe amoureux, ça n’existe pas dans la vraie vie. Et encore, si c’était vrai, son sort serait-il enviable?
Arrêtons de berner les filles! «Anora» donne une autre version de ces romances à l’eau de rose qui ont mené tant de filles à la déception et les ont empêchées d’être les actrices de leur vie.
Any (Mikey Madison) est une jeune prostituée de Brooklyn. Elle rencontre Yvan (Mark Eydelshteyn) dans la boîte de striptease où elle travaille, il la trouve à son goût et il la rappelle…
Elle va y croire, Any, à l’histoire d’amour avec son prince charmant.
Et pourtant, ce n’est pas Richard Gere qui l’emmène à l’opéra en jet privé mais un sale gamin gâté (quoique très mignon) qui dilapide l’argent de son père, un oligarque russe.
Elle prendra bien un jet privé mais pour aller à Las Vegas où, avec une bande de copains très éméchés, ils feront la fête et se marieront.
Walt s’arrêterait là mais les parents du jeune marié ne font certainement pas partie de son fan-club. Ils sont furieux et veulent faire annuler le mariage.
Any tombe de son petit nuage mais elle ne va pas se laisser faire. Alors que son chéri s’est enfui à l’annonce de l’arrivée imminente de ses parents, elle se bat bec et ongles et tient tête aux hommes de main russes qui veulent la maîtriser.
Elle finira par se rendre à l’évidence parce que dans la vraie vie, les petites cendrillons ne deviennent jamais des princesses.
Certes, le film est un peu long, surtout le passage où tout le monde cherche le jeune russe peu courageux parti à la dérive mais il ne manque pas d’humour, surtout dans les seconds rôles masculins.
Ce film est féministe car Anora est une femme forte qui se bat pour s’en sortir mais surtout parce qu’il montre aux filles la réalité des choses sans les maintenir dans un rêve sirupeux où elles attendent tout d’un homme.
Je dis donc «Encore et encore» pour une vision réaliste des choses et non l’enfermement des petites filles dans les «contes de fée». Leur destin est entre leurs mains et elles doivent le savoir.
V.M.
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