The Ugly Stepsister d’Emilie Blichfeldt (2025)
Faire de Cendrillon un film féministe « beauty horror » est une gageure que la réalisatrice norvégienne Emilie Blichfeld a relevé haut la main.
Même les frères Grimm n’auraient pas osé. Elle réinterprète de manière sombre et grotesque un de leur classique. Qu’en penserait Walt Disney et sa guimauve sirupeuse ?
« The ugly stepsister » est le troisième long métrage de la jeune réalisatrice née en 1991. Il a été présenté en avant-première au « Festival du film de Sundance » en 2025.
Ca commence comme un conte de fée mais l’histoire va vite nous échapper. Une femme arrive avec ses 2 filles (Elvira et Alma) pour rencontrer son nouveau mari et sa fille (Agnès). Le vieux marié n’est pas des plus sympas et on ne verse pas de larmes lorsqu’il meurt pendant le premier repas du soir.
Il n’y aura d’ailleurs que sa fille Agnès pour le pleurer. Mais la jeune femme n’est pas une frêle oie blanche ! Elle se fait prendre par derrière par le palefrenier du domaine dès qu’elle le peut. Par derrière pour rester vierge car c’est bien la condition pour pouvoir se marier.
L’histoire se situe au XIXème siècle et que peut espérer la gent féminine si ce n’est trouver un beau parti. Même la « méchante » belle-mère n’avait pas d’autre solution. Elle n’a pas eu de flair car la voici veuve d’un second mari ruiné.
Bref, tout ce petit monde de femmes se retrouve sans le sou. Même pas assez pour enterrer le mari qui pourrit dans une pièce du château.
Si c’est un conte de fée, il y a forcément un prince ! Celui du royaume ne s’appelle pas charmant mais Julian. Il passe ses journées à boire, chasser et trousser les jupons avec ses deux acolytes du même acabit. Il méprise les femmes mais il doit trouver une épouse. Un bal va être organisé !
L’histoire va se focaliser non pas sur Agnès (Théa Sofie Loch Néss), la pseudo-Cendrillon belle naturellement mais sur sa demi-sœur Elvira (Lea Myren). La jeune fille est bercée de poésie et rêve d’épouser le prince Charmant. Mais elle est boulotte et son physique est ingrat ! Horreur, malheur, les princes n’épousent que les jolies filles !
Quoiqu’il en soit, sa mère va épuiser ses dernières économies pour la rendre irrésistible. Des cours de danse, des opérations de chirurgie esthétique (le nez et des faux-cils incrustés dans les paupières), des régimes draconiens,… Rien ne sera épargné à la pauvre fille.
Docile, elle suivra tous les conseils aveuglément. Elle avalera même un oeuf de ténia qui grandira en elle pour avaler tout ce qu’elle mange.
Des vers, on en verra beaucoup dans le film. Il y a ceux qui dévorent le père mort, ceux qui vont tisser la robe de Cendrillon et ceux qui dévorent Elvira de l’intérieur.
Le jour J est arrivé et Elvira est à bout de forces. Elle perd ses cheveux à cause de la malnutrition et son ventre gargouille continuellement (le ténia est affamé). Peu importe, une jolie robe de princesse et une perruque feront illusion. Elle est mince, elle a un joli nez et des yeux de biche. Ca devrait marcher pour ferrer le prince.
Je m’arrêterai là mais l’histoire n’est pas finie. Les scènes les plus gores sont encore à venir.
« Pour être belle, il faut souffrir ! » ! Aujourd’hui encore, cette phrase est répétée aux petites filles. Pour répondre aux normes de beauté, elles sont ciselées, affamées, charcutées,… et ce n’est pas près de s’arrêter. Non, être belle ne signifie pas être heureuse. Et qu’est-ce qu’être belle ?
Dans la lignée de Coralie Fargeat avec « The substance », un film qui dénonce la course à la beauté et/ou au jeunisme dont les femmes sont victimes. Quand pourra-t-on dire « Plus jamais ça » ?
V.M.
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