Dis-moi juste que tu m’aimes d'Anne Le Ny (2024)
Anne Le Ny est née à Antony en 1962. Elle a étudié l’art dramatique au Conservatoire National. Elle débute sa carrière comme comédienne de théâtre puis se dirige vers le cinéma et la télévision. Son visage nous est familier et pourtant, son nom n’est pas très connu parce qu’elle est cantonnée aux seconds rôles. Elle a été nommée au César de la meilleure actrice dans un second rôle en 2012 pour son interprétation d’Yvonne, la gouvernante dans « Intouchables ».
Elle réalise son premier long-métrage, « Ceux qui restent », en 2007. Il est nommé au César du meilleur premier film et à celui du meilleur scénario (écrit par elle aussi). On lui doit, entre autres, « Les invités de mon père » (2010), « On a failli être amies » (2014) et « Le Torrent » (2022). « Dis-moi juste que tu m’aimes » est son septième film.
Marie (Elodie Bouchez) est mariée depuis 15 ans avec Julien (Omar Sy). Il est CPE dans un lycée et elle est assistante commerciale dans une grande entreprise. Avec leurs 2 filles et des jobs à temps plein, la routine laisse peu de place pour la relation de couple. Mais Marie est toujours éperdument amoureuse. Alors, quand l’amour de jeunesse de Julien revient s’installer à Vannes, elle craint de le perdre. Aveuglée par son complexe d’infériorité, elle est persuadée qu’il va retomber dans les bras d’Anaëlle (Vanessa Paradis). Thomas (José Garcia), son nouveau supérieur hiérarchique, perçoit immédiatement son manque de confiance en elle et l’entraîne dans une relation extraconjugale avec une habilité machiavélique.
Ce qui intéresse Anne Le Ny, c’est l’humain : « voir les choses à la hauteur de l’homme ou de la femme qui les vit ». Elle nous entraîne dans un « thriller domestique » (selon ses propres termes) complètement ancré dans la réalité. Elle décrit avec acuité le processus d’emprise et excelle à donner de la crédibilité et de l’humanité aux protagonistes. Le choix de situer l’intrigue dans la classe moyenne n’y est pas étranger. La majorité des spectateurs peut s’identifier aux personnages. Contrairement à la plupart des films qui se passent dans des milieux aisés et des logements somptueux ou dans des banlieues pauvres et des immeubles délabrés.
Le réalisme est accentué par la formidable prestation d’Elodie Bouchez et de José Garcia, très bien secondés par Omar Sy et Vanessa Paradis dans des rôles inhabituels. Coup de cœur pour Jennifer Decker, qui interprète Cassandre, la sœur de Marie, une artiste bien dans ses baskets, qui pratique le Kintsugi (art japonais qui consiste à réparer les objets cassés avec une préparation en poudre d'or. Cette technique ne nie pas le passé brisé, mais l'accepte, créant ainsi une nouvelle valeur). Tout un symbole pour cette histoire d’une femme fragile et brisée qui va se révéler plus solide qu’il n’y paraît.
Adolescente, Anne Le Ny souhaitait être comédienne ou écrivaine. Elle ne pensait pas qu’elle allait devenir réalisatrice, tout simplement parce qu’il n’y avait pas de réalisatrices à l’époque. Comme elle dit : « quand on n’a pas de modèle, c’est difficile de s’identifier ». Ces propos entendus dans une Master Class résonnent complètement avec le slogan de Ciné Women « Les filles aussi ont besoin de modèles inspirants ». Nous espérons encore et encore découvrir des films d’Anne Le Ny et de beaux portraits de femmes résilientes comme Marie.
A.C.
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