Comeback de Yan et Raf Roosens (2024)


Yan et Raf Roosens sont deux frères qui, avec leur boîte de production anversoise, réalisent des clips, des pubs et des courts métrages. Bien que, dans un premier temps, Yan soit devenu ingénieur commercial, il va ensuite rejoindre son frère Raf pour réaliser des films. Leur cinéma est une affaire de famille. Ils aiment explorer les dynamiques familiales et les relations humaines.


En 2015, « Copain » a remporté la Palme d’Or du court-métrage à Cannes. « Comeback », leur premier long métrage, a ouvert la dernière édition du Festival du Film d’Ostende.


Ava (Billie-Louise Vlegels) est la fille de deux DJs célèbres qui viennent de se séparer. Elle vit avec son père (Zwangere Guy) qui s’est reconverti comme cuistot. Elle mène une vie stable même si sa mère lui manque beaucoup depuis plusieurs mois. Naomi (Veerle Baetens) vivrait à Ibiza pour relancer sa carrière.


Ava retrouve Naomi dans une discothèque et pense qu’elle vient de rentrer. Mère et fille sont heureuses de se revoir mais les relations ne sont pas si faciles…


Ava est prête à tout pour plaire à sa mère. Ses copines l’envient : « Si ma mère était DJ et avait le look de la tienne, je lui piquerais ses fringues. La mienne travaille au supermarché et ne porte que des gilets beiges… ». Mais la vie d’artiste bohème et exaltante de Naomi ne laisse chez Ava que des vides difficiles à surmonter.


Naomi n’a que peu de temps à consacrer à sa fille. Elle l’emmène dans le tourbillon de la vie nocturne où Billie commence à se perdre en voulant s’identifier à sa mère. En quête d’identité, elle se sent déchirée entre ses deux parents.


La réalité va la frapper de plein fouet. Naomi n’a jamais vécu à Ibiza mais dans un sordide appartement où elle essaie de se reconstruire depuis son divorce. Elle n’a pas la possibilité d’héberger sa fille ni de lui donner un cadre de vie correct.


Pas facile d’être mère quand on quitte les sentiers battus dictés par une société patriarcale ! Comment mener de front une carrière et un rôle de mère ? Faut-il sacrifier ses ambitions lorsqu’on devient parent ? Naomi peine à assumer ses responsabilités et elle a choisi « d’abandonner » sa fille à son père pour qu’elle ait une vie plus stable.


N'est-ce pas la plus grande abnégation que de laisser son enfant plutôt que vouloir le garder absolument quand on n’est pas capable de l’élever. Les femmes qui choisissent d’accoucher sous X pour confier leur enfant à l’adoption ne font-elles pas preuve d’altruisme ?


Malheureusement, avec la remise en question du droit à l’avortement et la précarité des mamans solos, ce cruel dilemme risque de devenir de plus en plus courant.


Les frères Roosens ont dressé le portrait d’une famille où les rôles sont inversés. C’est la mère qui a des ambitions professionnelles et le père qui a changé de vie pour élever sa fille. Cette situation est un peu utopique et malheureusement assez rare dans notre société.


Mais revenons au film. Le duo mère-fille fonctionne à merveille et pour cause, Billie-Louise Vlegels est la vraie fille de Veerle Baetens. Le rappeur Bruxellois Gorik van Oudheusden alias Zwangere Guy, qui joue le rôle du père, connaît très bien la musique et le monde de la nuit.


Le film a été tourné entièrement avec une caméra 16 mm. La photographie granuleuse et les jeux de lumière accentuent le contraste entre la nuit et le jour.


Enfin, la musique y joue un rôle prépondérant. Elle a été composée par Jeroens De Passemier, fondateur du groupe belge « The Subs ». Sans oublier la chanson « Elle danse seule » d’Axelle Red qui ouvre et termine le film dans une atmosphère mélancolique.


Un film plein de bons sentiments qui prône la bienveillance et la réconciliation. Si jamais c’était vrai…


V.M.