La Furia de Gemma Blasco  (2025)


Gemma Blasco est une réalisatrice et scénariste espagnole née en 1993. Elle a réalisé des courts métrages, des publicités et des œuvres audiovisuelles pour le théâtre. C’est en 2018 qu’elle a écrit le synopsis de « La Furia » qui sera son deuxième long métrage après « Zoo », un film assez expérimental.


« La furia » a remporté plusieurs prix au Festival du film de Malaga et Angela Cervantes, l’héroïne, y a reçu le prix de la meilleure actrice.


Gemma Blasco et son actrice principale sont des amies proches depuis le lycée. Il n’y a pas eu de casting. Le choix s’est imposé pour ce film qui parle d’une agression sexuelle subie par la réalisatrice à l’âge de 18 ans. La complicité entre les deux femmes leur a permis d’aller très loin dans les émotions.


Alex (Angela Cervantes) est une jeune comédienne qui aime faire la fête avec ses ami.e.s et son frère. La veille du Nouvel an, elle subit un viol mais elle ne verra pas son violeur.


Le film est réalisé par une femme et c’est là toute la différence. Aucune complaisance ni érotisation de ce crime ! Le violeur pousse Alex dans une pièce et ferme la porte. C’est l’obscurité totale pour la victime mais aussi pour les spectateurices. L’écran est noir, juste quelques bruits durant tout le temps de l’agression.


Un viol, c’est horrible et Gemma Blasco veut montrer tout le sordide et la violence de l’acte. Alex a ses règles et elle devra récupérer le tampon enfoncé bien loin par son bourreau. Elle devra aussi essuyer le sperme qui coule entre ses jambes avant de rentrer chez elle. Et bien non, il n’y a rien de glamour dans un viol, il y a du sang et des sécrétions. Un viol, ça pue.


Du sang, on en verra beaucoup tout au long du film, les odeurs aussi sont omniprésentes. Puisqu’Alex n’a pas vu le lâche, elle essaiera de le retrouver via son odeur. Sera-ce fiable ?


Comme la réalisatrice a vécu une agression sexuelle (1 femme sur 4 en Belgique selon les statistiques), elle sait de quoi elle parle.
Va suivre ce que l’on appelle « le viol secondaire », c’est-à-dire ce que la victime doit encore endurer : les questions du médecin qui l’examine, les injonctions à porter plainte, la honte de son frère qui ramène tout à lui,… Le pauvre petit mâle ne le vit pas bien, il veut faire justice pour défendre l’honneur de sa sœur qui ne lui a rien demandé. C’est peut-être un de ses potes ? Il veut le savoir sans se soucier du désir de la victime.


Mais Alex veut se taire et c’est son droit. Dénoncer les violeurs est évidemment ce qu’il faut faire. Ils ne doivent pas rester impunis ! Mais encore faudrait-il que la justice évolue. Combien de plaintes sont classées sans suite et combien de procès aboutissent à un « non-lieu » ?


Alex veut mener son processus de guérison seule. Elle parviendra à exhorter la honte et la peur en interprétant le rôle de Médée sur scène. Lors d’une audition, l’intensité et la rage dont elle fait preuve lui vaudront d’obtenir le rôle-titre. A chacun.e son chemin.


Evidemment, il ne faudrait « Plus jamais ça » mais il y a encore un long chemin à parcourir. Les violeurs ne sont pas des monstres tapis dans le noir, c’est « monsieur tout le monde » et dans près de 80% des cas, ce sont des proches des victimes.
Violer, c’est avilir mais aussi dominer et écraser l’autre. La honte doit pourtant changer de camp.


V.M.


Réforme du droit pénal sexuel 

Les chiffres en disent long. Dans notre pays, par exemple, 8 plaintes pour viol sont déposées en moyenne chaque jour. Or, le nombre réel est beaucoup plus élevé. Si l’on tient compte du fait que les victimes n’osent souvent pas porter plainte, on estime que dans notre pays, 80 viols sont commis chaque jour. Dans 75 % des cas, le violeur est connu de la victime.
Le viol n’est qu’une des formes de violence à caractère sexuel. Les chiffres relatifs aux attentats à la pudeur, à l’intimidation sexuelle, au harcèlement ou à la violence entre partenaires sont également stupéfiants. Dans 93 % des cas d’infractions sexuelles, les victimes sont des femmes ou des filles.
Pourtant, seuls 10 % des plaintes pour viol aboutissent à une condamnation. L’une des raisons de l’absence de poursuites est que la législation sur les violences sexuelles est tout à fait dépassée.
Le droit pénal sexuel en Belgique a été réformé à partir du 1er juin 2022. La réforme a introduit la nécessité de consentement qui obtient une place centrale, et a attribué de nouvelles définitions aux infractions sexuelles. Les peines ont été alourdies dans certains cas…