The Shameless de Konstantin Bojanov (2024)
Le réalisateur bulgare Konstantin Bojanov est un passionné de l’Inde. Il va d’abord partir d’un livre pour réaliser un documentaire mais après plus de dix ans, le projet va évoluer en une fiction : « The shameless ». Il s’agit de son troisième long métrage.
Le film a été présenté à Cannes en 2024, dans la catégorie « Un certain regard » et c’est l’actrice indienne Anasuya Sengupta a reçu le prix d’interprétation féminine pour le rôle de Renuka. Cette dernière est également poétesse, écrivaine et militante en faveur d’une meilleure représentation des personnes marginalisées. C’est son premier rôle au cinéma.
Renuka (Anasuya Sengupta) est une prostituée. A l’âge de 13 ans, lasse d’être abusée par son père et son frère, elle se marie mais son mari ne vaut guère mieux puisqu’il va la vendre dans un bordel. Elle aime les femmes et déteste les hommes. On ne peut que la comprendre. Mais malgré cela, pour survivre, elle doit subir leurs assauts à longueur de journées et de nuits.
Le film commence lorsqu’elle s’échappe d’un bordel de Delhi après avoir assassiné un de ses « clients ». Elle va arriver dans une communauté de prostituées du nord de l’Inde. Et oui, ça existe… Elle va enchaîner les passes pour pouvoir s’acheter une nouvelle identité, le tout dans un contexte de misogynie ambiante.
Dans cette ville, pas de sororité ! Les femmes n’ont pas été éduquées pour cela. Elles obéissent au patriarcat en intégrant ses règles. On ne s’aide pas entre femmes, on essaie de survivre même au dépend de ses comparses. Sa logeuse va lui voler son argent et personne ne lui viendra en aide.
Renuka va rencontrer Devika (Omara Shetty), une jeune fille de 17 ans, destinée à la prostitution. La mère de celle-ci (Auroshikha Rey), elle-même prostituée, attend de vendre la virginité de sa fille au plus offrant. Elle reproduit ainsi le schéma malsain dont elle a elle-même été victime. Elle n’a rien connu d’autre, l’histoire se répète.
Devika cache sa féminité tant bien que mal pour retarder le viol qui l’attend. Sa sœur vient de partir dans un bordel à Delhi et son avenir à elle est tout tracé. Seule, la matriarche de la famille (Mita Vasisht) apporte un peu d’humanité. Mais, tiraillée entre ce qu’elle a toujours connu et l’amour pour sa petite fille qu’elle protège, elle finira par se résigner.
Ces deux femmes brisées vont se trouver. Elles vont vivre un amour interdit. Petit bémol pour le « duo classique » composé de la lesbienne d’un certain âge qui va initier la jeune oiselle qui n’a jamais rien connu. Cette dernière sait qu’elle ne veut pas d’un avenir de prostituée mais quelles sont les alternatives ?
Bref, les deux femmes vont essayer d’échapper à leur destin mais dans un monde régi par les hommes et dans lequel ils ont tous les droits, c’est malheureusement loin d’être gagné.
Le film est porté par quatre actrices incroyables de force et de vulnérabilité. C’est son attrait principal.
Mais qu’ont bien pu faire les femmes pour récolter tant de haine ? Partout dans le monde, elles subissent de la violence et/ou une atteinte à leurs droits fondamentaux. Les statistiques montrent que la situation de s’améliore pas, loin de là.
Je dis « Plus jamais ça » mais sans beaucoup de conviction, malheureusement.
V.M.
Copyright © Tous droits réservés